Messages à l’occasion du 55e anniversaire de Nostra aetate (n°4)

Dans une manifestation d’amitié, la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec les juifs (CRRJ) et le Comité international juif pour les consultations interreligieuses (IJCIC) ont échangé le 28 octobre 2020, des messages publics pour commémorer le 55e de Nostra aetate, le document phare de l'Église catholique qui définit une ère nouvelle et meilleure dans les relations entre chrétiens et juifs.

Message du cardinal Kurt Koch président de la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme (CRRJ) pour le Comité international juif pour les consultations interreligieuses (IJCIC) à l’occasion du 55e anniversaire de Nostra aetate (n°4)

Rome, le 28 octobre 2020

C’est avec une grande joie et satisfaction que nous commémorons le 28 octobre 2020 le 55e anniversaire de la déclaration Nostra aetate (n° 4) du Concile Vatican II. Pour marquer cette occasion, j’ai le plaisir de m’adresser au Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC), qui, depuis sa fondation en 1970, est le partenaire officiel de la Commission pour les relations religieuses avec les juifs du Saint-Siège pour la promotion et le développement du dialogue entre juifs et catholiques au niveau mondial. Il ne fait aucun doute que Nostra aetate (n°4) a jeté les bases des relations entre catholiques et juifs, et peut donc être considérée à juste titre comme la Magna Carta du dialogue judéo-chrétien. C’est en réfléchissant au mystère de l’Église elle-même que le Concile Vatican II a été amené à explorer sa relation avec les descendants d’Abraham. Cette affirmation est des plus significatives, car elle souligne le fait que ce n’est ni pour une raison extérieure à la vie de l’Église, ni pour des motifs fortuits ou facultatifs, que les catholiques ont été inspirés à réfléchir sur leur lien avec le peuple juif, mais plutôt en raison de leur propre réflexion sur le mystère de l’Église.

Nous lisons dans le premier verset du psaume 133: «Qu’il est bon, qu’il est agréable, pour des frères de demeurer unis!» Alors qu’à l’origine, le «frère» était exclusivement compris comme appartenant au peuple d’Israël, aujourd’hui ¬– après que le pape Jean-Paul II ait parlé des juifs comme des frères aînés des chrétiens, et le pape Benoît XVI comme nos pères dans la foi – nous pouvons parler d’une communauté de frères et de sœurs parmi les juifs et les chrétiens. Nous sommes inséparablement liés par le fondement essentiel de la foi au Dieu d’Israël, et nous sommes unis par un riche héritage spirituel commun et le legs d’un passé partagé de longue date. Le christianisme a ses racines dans le judaïsme; ce dernier constitue le noyau de son identité. Jésus est et reste un fils du peuple d’Israël; il est façonné par cette tradition et, pour cette raison, ne peut être véritablement compris que dans la perspective de ce cadre culturel et religieux.

Le dialogue entre catholiques et juifs a fait sienne cette vision, dans un esprit d’amitié fraternelle et authentique. C’est avec gratitude que je réfléchis au fait qu’au niveau de la coexistence quotidienne, de nombreux groupes sont apparus dans le monde entier, visant à jeter des ponts entre juifs et catholiques dans l’esprit de Nostra aetate (n° 4). En fin de compte, il s’agit d’acquérir une compréhension mutuelle plus profonde, toujours dans le respect mutuel des traditions religieuses de chacun, et de cultiver la valeur de l’autre. Les catholiques et les juifs devraient toujours chercher à se familiariser davantage les uns avec les autres. Cet aspect ne doit jamais être négligé, en particulier dans les domaines de l’éducation et de la formation.

À l’origine, notre Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme et l’IJCIC avaient l’intention de commémorer le 55e anniversaire de Nostra aetate (n° 4) à l’occasion de la réunion du Comité de liaison international catholique-juif (ILC) prévue à São Paolo (Brésil) à la fin d’octobre 2020. Cependant, pour des raisons évidentes, il n’a pas été possible d’organiser cette conférence. Pourtant, même si nous n’avons pas pu nous rencontrer personnellement, nos contacts restent solides, ce qui témoigne du fait que notre amitié est stable et forte. Rendons grâce à Dieu l’Éternel et le Tout-Puissant pour ces liens d’amitié et pour tout ce qui a été accompli au cours des dernières décennies de dialogue entre juifs et catholiques.

Kurt Cardinal Koch, Président de la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme du Saint-Siège

Message du Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC) au cardinal Kurt Koch et à la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec le judaïsme à l’occasion du 55e anniversaire de Nostra aetate (n°4)

New York, le 28 octobre 2020

Le Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC) se joint au cardinal Kurt Koch et à la Commission du Saint-Siège pour les relations religieuses avec les juifs pour commémorer avec joie le 55e anniversaire de la promulgation de la déclaration Nostra aetate (n° 4) du Concile Vatican II, la déclaration transformatrice du 28 octobre 1965 sur les relations de l’Église catholique avec le peuple juif.

L’IJCIC est fière de ses 50 ans en tant que partenaire officiel de l’Église catholique, représentant le judaïsme mondial dans son dialogue dynamique avec le Vatican. Les onze organisations constitutives de l’IJCIC (American Jewish Committee, Anti-Defamation League, B’nai B’rith International, Central Conference of American Rabbis, Israeli Jewish Council for Interreligious Relations, Rabbinical Assembly, Rabbinical Council of America, Union for Reform Judaism, Union of Orthodox Congregations of America, United Synagogue of Conservative Judaism, World Jewish Congress) s’unissent dans leur diversité idéologique et internationale pour faire progresser les relations entre catholiques et juifs.

Nostra aetate (n° 4) est un document qui fait date et qui exprime la promesse d’une ère nouvelle et meilleure dans les relations entre chrétiens et juifs. On y déclare: «Du fait d’un si grand patrimoine spirituel, commun aux chrétiens et aux Juifs, le saint Concile veut encourager et recommander la connaissance et l’estime mutuelles, qui naîtront surtout d’études bibliques et théologiques, ainsi que d’un dialogue fraternel» (n° 4). Cette aspiration a été réalisée par les enseignements et les initiatives de l’Église qui se sont développés depuis 1965 suite à Nostra aetate (n° 4). Elle a été considérablement amplifiée par les visites papales aux synagogues, aux sites horribles mais sacrés des crimes de l’Holocauste, et à l’État d’Israël après l’établissement des relations diplomatiques entre le Vatican et Israël en 1993.

De façon tout aussi importante, les Juifs ont accueilli la main tendue de l’Église et ont créé les structures et les modalités de réponses religieuses, communautaires et universitaires nécessaires pour s’associer aux catholiques à une époque qui a transformé deux millénaires d’inimitié en une bénédiction d’amitié. Depuis un demi-siècle, les communautés juives du monde entier ont tendu la main aux catholiques dans un esprit d’amitié. L’IJCIC a été le chef de file du partenariat avec l’Église, notamment grâce à cinq décennies de réunions biennales du Comité international de liaison catholique-juif (ILC), au cours desquelles les dirigeants catholiques et juifs se réunissent pour dialoguer et aborder les questions émergentes.

Aussi importantes que ces structures formelles aient été, les progrès des relations entre catholiques et juifs ont été renforcés par la profondeur des relations entre les dirigeants catholiques et juifs et par celles de leurs commettants. Nos amitiés ont assuré une communication ouverte et franche qui est essentielle pour aborder les questions difficiles. Nous avons fait l’expérience et affirmé dans notre rencontre une conviction commune que les êtres humains sont créés à l’image de Dieu (Genèse 1,27) et que nos destinées sont inextricablement liées. Alors que nous luttons contre une pandémie qui ne fait pas de distinction entre ses victimes, ces valeurs nous rapprochent en tant que repères pour notre vie religieuse.

À l’heure où l’antisémitisme est en hausse et où la menace physique qui pèse sur les communautés et les individus juifs est très réelle, nous sommes reconnaissants au pape François de sa fermeté, qui s’est exprimé avec force et de manière répétée contre ce fléau. Au début de son pontificat, lorsque le pape François a rencontré l’IJCIC, il a rappelé au monde la ferme condamnation par Nostra aetate (n° 4) de «la haine, des persécutions et de toutes les formes d’antisémitisme». Il a ajouté : «En raison de nos racines communes, un chrétien ne peut être antisémite!»

De même, nous sommes solidaires de nos frères et sœurs chrétiens qui sont victimes de graves atteintes à la liberté religieuse, de discrimination et de persécution dans un certain nombre de pays non démocratiques à travers le monde.

En ce 55e anniversaire, nous prions pour se maintienne et se développe la réconciliation amorcée par Nostra aetate (n° 4) et mise en œuvre au cours des décennies suivantes de partenariat entre catholiques et juifs. Que Dieu bénisse nos efforts. Que notre exemple soit un phare de lumière pour toute l’humanité.

Rabbin Noam E. Marans, président du Comité international juif pour les consultations interreligieuses

Remarques de l’éditeur

La Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme (CRRJ) a été fondée en 1974 pour réaliser le mandat de Nostra aetate (n°4). Au fil des décennies, la Commission a élargi ses enseignements et ses initiatives et convoque aux deux ans, conjointement avec l'IJCIC, le Comité international de liaison entre l’Église catholique et le judaïsme pour traiter de questions actuelles d’intérêt mutuel.

Le Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC) regroupe onze organisations qui s’unissent, dans leur diversité idéologique et internationale, pour faire progresser les relations entre catholiques et juifs. L’IJCIC est le partenaire officiel de l'Église catholique depuis un demi-siècle, à titre de représentant du judaïsme mondial pour le dialogue avec le Vatican.

Source : Comité juif international pour les consultations interreligieuses (IJCIC).