La rencontre d’Assise 2011

Le 27 octobre 2011 marquait le 25e anniversaire de la première Journée d’Assise, convoquée par Jean Paul II. À cette occasion, Benoît XVI a invité près de 300 représentants de toutes les religions, spiritualités et sagesses à une rencontre de réflexion, de dialogue et de prière pour la paix et la justice dans le monde sur le thème "PÈLERINS DE LA VÉRITÉ, PÈLERINS DE LA PAIX". Nous reproduisons ici les interventions du Rabin David Rosen, du Rév. Olav Fyske Tveit et du Pape Benoît XVI lors de la session du matin à la Basilique Sainte-Marie-des-Anges.

Une montée vers Dieu [1]

Intervention du Rabin David Rosen, Directeur international des affaires religieuses (AJC), représentant du Grand Rabbin d’Israël

Le pèlerinage comme montée

Par définition, un pèlerinage est beaucoup plus qu’un voyage. L’expression hébraïque pour un pèlerinage est "aliyah la'regel", ce qu’on pourrait traduire par "la montée pour la fête pédestre".

Le concept biblique de montée était à la fois littéral et spirituel. Il était littéral parce que l'on devait gravir les monts de Judée jusqu'à Jérusalem, jusqu'au Temple.

Mais le symbolisme physique cherchait à générer dans la conscience du pèlerin l'état d'esprit qui correspondait à une ascension spirituelle, à un rapprochement encore plus étroit avec Dieu; et, par conséquent, à ce qu'il soit en accord avec la volonté et les commandements de Dieu.

La vision messianique de la paix

Cette vision du pèlerinage, de la montée, est centrale dans la vision prophétique de l'établissement du Royaume des cieux sur terre, la vision messianique de la paix universelle.

C'est ce qu'exprime le prophète Isaïe: "Des peuples nombreux se mettront en marche et diront: 'Venez, montons à la montagne du SEIGNEUR, à la Maison du Dieu de Jacob. Il nous montrera ses chemins, et nous marcherons sur ses routes.' Oui, c'est de Sion que vient l'instruction et de Jérusalem la parole du SEIGNEUR. Il sera juge entre les nations, l'arbitre de peuples nombreux. Martelant leurs épées, ils en feront des socs, de leurs lances, ils feront des serpes. On ne brandira plus l'épée nation contre nation, on n'apprendra plus à se battre" (Isaïe 2, 3-4).

Et le prophète continue: "Le loup habitera avec l'agneau, le léopard se couchera près du chevreau. Le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. La vache et l'ourse auront même pâture, leurs petits, même gîte. Le lion, comme le bœuf mangera du fourrage. Le nourrisson s'amusera sur le nid du cobra. Sur le trou de la vipère, le jeune enfant étendra la main. Il ne se fera ni mal, ni destruction sur toute ma montagne sainte, car le pays sera rempli de la connaissance du SEIGNEUR, comme la mer que comblent les eaux" (Isaïe 11, 6-9).

Il y a un commentaire bien connu du grand rabbin Meir Simha de Dwinsk, qui a vécu il y a une centaine d'années. Il fait remarquer que cette vision de paix s'était déjà réalisée dans l'histoire religieuse de l'humanité, dans l'arche de Noé. Déjà là, les animaux prédateurs devaient mener une existence végétarienne et leurs proies potentielles pouvaient vivre en paix.

Il signale cependant que la différence majeure entre la situation dans l'arche de Noé et dans la vision d'Isaïe est que dans l'arche de Noé, il n'y avait pas de choix. Les animaux n'avaient pas d'autre option pour survivre au déluge.

La vision d'Isaïe, au contraire, est le résultat de la "connaissance du Seigneur"; c'est une vision qui émane de la compréhension spirituelle et de la volonté la plus profonde.

La paix comme prérequis de la rédemption

Pour beaucoup, dans notre monde, la paix est une nécessité pragmatique; ce l'est effectivement, et nous ne devons en aucun cas renoncer à la bénédiction qu'un tel pragmatisme apporte à notre monde. Mais ce que les hommes et les femmes de foi cherchent et ce pourquoi ils s'efforcent de "gravir la montagne du Seigneur", c’est la reconnaissance de la paix comme l'expression par excellence de la volonté divine et de l'image divine en laquelle toute personne humaine est créée. 

Le bienheureux Jean Paul II mérite notre gratitude pour avoir merveilleusement démontré cette aspiration d'une manière particulièrement visible à Assise, il y a déjà vingt-cinq ans. Nous remercions aussi sincèrement son successeur le Pape Benoît XVI de poursuivre dans la même voie.

Les sages du Talmud nous enseignent que non seulement la "paix" est le nom de Dieu (Chabbat 10b – voir Juges 6, 24), mais aussi qu'elle est le prérequis essentiel pour la rédemption, comme il est écrit en Isaïe: "Il annonce la paix,… il annonce le salut" (Isaïe 52, 7; voir Deutéronome Rabba 20,10). De plus, nos sages soulignent qu'il n'y a aucune autre valeur que nous ayons l'obligation de poursuivre autant que celle de la paix, comme il est écrit: "Recherche la paix et poursuis-la" (Psaume 34,15).

Puisse la rencontre d'aujourd'hui stimuler tous les hommes et toutes les femmes de foi et de bonne volonté pour qu'ils redoublent d'effort afin de concrétiser cet objectif et d'en faire la réalité qui apporte la bénédiction véritable et la guérison à l'humanité, comme il est écrit, également en Isaïe: "Paix! paix à qui est loin et à qui est proche, et je le guérirai, dit le Seigneur" (Isaïe 57, 19).

 


 

François, un guide vers la paix pour Jérusalem [2]

Intervention du Rév. Olav Fyske Tveit, Secrétaire général du Conseil œcuménique des Églises

La foi et le courage des jeunes

Saint-François est une source d'inspiration pour nous: il nous montre comment la foi en Dieu, le dialogue ouvert et la rencontre authentique peuvent mener à des contributions significatives à une paix juste.

Le monde a besoin de croyants qui soient des artisans de paix. Les communautés de foi, telles que les 349 églises membres du Conseil œcuménique des Églises, ont besoin des jeunes "agents de changement" du monde. François était un jeune homme lorsqu'il a consacré sa vie à Dieu. Sa passion pour la bonté de la création et l'exemple de son audace radicale pour promouvoir la paix montrent la signification de la foi et du courage des jeunes. Ce que François à accompli dans la jeunesse de ses vingt ans est un rappel salutaire pour nous du rôle important que les jeunes doivent et peuvent jouer autant dans les communautés de foi que dans la société en général. Sans cela, nous ne serions pas ici aujourd'hui.

Encore aujourd'hui, la cause de la paix dans le monde a besoin des points de vue et des contributions des jeunes. Un grand obstacle à une paix juste, de nos jours, est le fort taux de chômage parmi les jeunes partout à travers le monde. C'est comme si nous étions en train de jouer avec le bien-être et le bonheur d'une génération. Nous avons besoin de la vision et du courage des jeunes pour faire les changements nécessaires. Nous voyons comment les jeunes prennent actuellement la direction des processus de démocratisation et de paix dans plusieurs pays. Les jeunes d'aujourd'hui sont des témoins et des artisans de la paix même lorsqu'ils deviennent victimes de la violence et de la terreur comme cela s'est produit en Norvège cet été. Nous devons avouer que nous n'avons pas toujours réussi à honorer et à soutenir les contributions que les jeunes peuvent faire dans nos communautés religieuses. Nous, les anciens qui sommes ici, devons travailler ensemble à promouvoir la paix entre les générations et à donner aux jeunes, partout dans le monde, un réel espoir pour l'avenir.

Interpellés par la conversion de François

Le monde a besoin de rencontres entre les dirigeants des communautés de foi. Au cours d'une guerre dont l'enjeu ultime était Jérusalem, François vint partager des expériences de foi avec le Sultan en Égypte. Comme bien des croisés, il venait pour convertir l'autre. Mais c'est lui-même qui a été transformé, converti.

Nous sommes ici pour nous laisser interpeller par la conversion de François et pour laisser la conversation entre nous devenir une source d'inspiration pour la justice et la paix. Il y a beaucoup à gagner dans le respect de l'autre. Une paix durable exige qu'il y ait un espace, un espace sûr et sécuritaire, non seulement pour moi, mais aussi pour l'autre. Comme chrétiens, nous devons nous rappeler que la croix n'a pas été voulue pour susciter des croisades, mais pour donner un signe de la manière dont Dieu embrasse toute personne, autant l'autre que nous-mêmes.  

La paix pour Jérusalem

Pour les prochaines années, le Conseil œcuménique des Églises est  clairement engagé à travailler pour l'avènement d'une paix juste à Jérusalem et pour tous les peuples qui vivent dans et autour de cette ville qui porte en son nom la paix, Shalom – Salam. Cette ville a été appelée et nommée pour être une vision de paix; mais, à travers l'histoire, elle est devenue trop souvent un lieu de conflit. Lorsque j'ai visité le Pakistan, il y a quelques années, j'ai été frappé de voir comment d'autres peuples souffrent d'un conflit d'intérêts résultant du fait que les conflits autour de Jérusalem ne sont pas résolus. Cette cité, qui est sainte pour les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans, est un symbole de notre aspiration, de nos désirs les plus profonds et les meilleurs, de notre amour de la beauté et de notre désir d'adorer Dieu. Mais cela nous fait aussi constater comment ce que nous avons de meilleur peut générer le pire. Au cours de l'histoire, les êtres humains ont eu beaucoup de difficulté à aimer sans aussi chercher à posséder en exclusivité.

En tant que dirigeants religieux, prions pour la justice et la paix pour Jérusalem et pour tous ceux qui y vivent. D'une manière mystérieuse, en même temps qu'elle nous dévoile ces réalités à propos de la condition humaine, Jérusalem nous met au défi de nous y engager. Les chrétiens croient que tous les humains sont créés à l'image de Dieu et affirment, par conséquent, le caractère inaliénable de la dignité humaine et l'unicité de l'humanité. Nous sommes appelés à participer au rétablissement de la paix pour Jérusalem, à la recréation et à la réparation du monde créé par Dieu. Nous sommes responsables, devant Dieu et les uns devant les autres, de la paix en notre temps et de ce que nous disons et ne disons pas pour y parvenir. Suivons ensemble l'exemple de Saint-François et d'autres, jeunes et vieux, femmes et hommes, et mobilisons-nous courageusement pour faire une paix juste. 

 


 

"Pèlerins de la vérite, pèlerins de la paix" [3]

Intervention du Pape Benoît  XVI

Où en est la cause de la paix?

Vingt-cinq années se sont écoulées depuis que le bienheureux Pape Jean-Paul II a invité pour la première fois des représentants des religions du monde à Assise pour une prière pour la paix. Que s’est-il passé depuis? Où en est aujourd’hui la cause de la paix? Alors la grande menace pour la paix dans le monde venait de la division de la planète en deux blocs s’opposant entre eux. Le symbole visible de cette division était le mur de Berlin qui, passant au milieu de la ville, traçait la frontière entre deux mondes. En 1989, trois années après Assise, le mur est tombé – sans effusion de sang. Subitement, les énormes arsenaux, qui étaient derrière le mur, n’avaient plus aucune signification. Ils avaient perdu leur capacité de terroriser. La volonté des peuples d’être libres était plus forte que les arsenaux de la violence. La question des causes de ce renversement est complexe et ne peut trouver une réponse dans de simples formules. Mais à côté des faits économiques et politiques, la cause la plus profonde de cet événement est de caractère spirituel : derrière le pouvoir matériel il n’y avait plus aucune conviction spirituelle. La volonté d’être libres fut à la fin plus forte que la peur face à la violence qui n’avait plus aucune couverture spirituelle. Nous sommes reconnaissants pour cette victoire de la liberté, qui fut aussi surtout une victoire de la paix. Et il faut ajouter que dans ce contexte il ne s’agissait pas seulement, et peut-être pas non plus en premier lieu, de la liberté de croire, mais il s’agissait aussi d’elle. Pour cette raison nous pouvons relier tout cela de quelque façon aussi à la prière pour la paix.

Mais qu’est ce qui est arrivé par la suite? Malheureusement nous ne pouvons pas dire que depuis lors la situation soit caractérisée par la liberté et la paix. Même si la menace de la grande guerre n’est pas en vue, toutefois, malheureusement, le monde est plein de dissensions. Ce n’est pas seulement le fait que ici et là à maintes reprises des guerres ont lieu – la violence comme telle est potentiellement toujours présente et caractérise la condition de notre monde. La liberté est un grand bien. Mais le monde de la liberté s’est révélé en grande partie sans orientation, et même elle est mal comprise par beaucoup comme liberté pour la violence. La dissension prend de nouveaux et effrayants visages et la lutte pour la paix doit tous nous stimuler de façon nouvelle.

La violence à motif religieux

Cherchons à identifier d’un peu plus près les nouveaux visages de la violence et de la dissension. À grands traits – à mon avis – on peut identifier deux typologies différentes de nouvelles formes de violence qui sont diamétralement opposées dans leur motivation et qui manifestent ensuite dans les détails de nombreuses variantes. Tout d’abord il y a le terrorisme dans lequel, à la place d’une grande guerre, se trouvent des attaques bien ciblées qui doivent toucher l’adversaire dans des points importants de façon destructrice, sans aucun égard pour les vies humaines innocentes qui sont ainsi cruellement tuées ou blessées. Aux yeux des responsables, la grande cause de la volonté de nuire à l’ennemi justifie toute forme de cruauté. Tout ce qui dans le droit international était communément reconnu et sanctionné comme limite à la violence est mis hors jeu. Nous savons que souvent le terrorisme est motivé religieusement et que justement le caractère religieux des attaques sert de justification pour la cruauté impitoyable, qui croit pouvoir reléguer les règles du droit en faveur du «bien» poursuivi. Ici la religion n’est pas au service de la paix, mais de la justification de la violence.

La critique de la religion, à partir des Lumières, a à maintes reprises soutenu que la religion fut cause de violence et ainsi elle a attisé l’hostilité contre les religions. Qu’ici la religion motive de fait la violence est une chose qui, en tant que personnes religieuses, doit nous préoccuper profondément. D’une façon plus subtile, mais toujours cruelle, nous voyons la religion comme cause de violence même là où la violence est exercée par des défenseurs d’une religion contre les autres. Les représentants des religions participants en 1986 à Assise entendaient dire – et nous le répétons avec force et grande fermeté : ce n’est pas la vraie nature de la religion. C’est au contraire son travestissement et il contribue à sa destruction. Contre ceci, on objecte : mais d’où savez-vous ce qu’est la vraie nature de la religion? Votre prétention ne dérive-t-elle pas peut-être du fait que parmi vous la force de la religion s’est éteinte? Et d’autres objecteront: mais existe-t-il vraiment une nature commune de la religion qui s’exprime dans toutes les religions et qui est donc valable pour toutes? Nous devons affronter ces questions si nous voulons contester de façon réaliste et crédible le recours à la violence pour des motifs religieux. Ici se place une tâche fondamentale du dialogue interreligieux – une tâche qui doit être de nouveau soulignée par cette rencontre. Comme chrétien, je voudrais dire à ce sujet : oui, dans l’histoire on a aussi eu recours à la violence au nom de la foi chrétienne. Nous le reconnaissons, pleins de honte. Mais il est absolument clair que ceci a été une utilisation abusive de la foi chrétienne, en évidente opposition avec sa vraie nature. Le Dieu dans lequel nous chrétiens nous croyons est le Créateur et Père de tous les hommes, à partir duquel toutes les personnes sont frères et sœurs entre elles et constituent une unique famille. La Croix du Christ est pour nous le signe de Dieu qui, à la place de la violence, pose le fait de souffrir avec l’autre et d’aimer avec l’autre. Son nom est «Dieu de l’amour et de la paix» (2 Co 13, 11). C’est la tâche de tous ceux qui portent une responsabilité pour la foi chrétienne, de purifier continuellement la religion des chrétiens à partir de son centre intérieur, afin que – malgré la faiblesse de l’homme – elle soit vraiment un instrument de la paix de Dieu dans le monde.

La violence consécutive à l'absence de Dieu

Si une typologie fondamentale de violence est aujourd’hui motivée religieusement, mettant ainsi les religions face à la question de leur nature et nous contraignant tous à une purification, une seconde typologie de violence, à l’aspect multiforme, a une motivation exactement opposée : c’est la conséquence de l’absence de Dieu, de sa négation et de la perte d’humanité qui va de pair avec cela. Les ennemis de la religion – comme nous l’avons dit – voient en elle une source première de violence dans l’histoire de l’humanité et exigent alors la disparition de la religion. Mais le « non » à Dieu a produit de la cruauté et une violence sans mesure, qui a été possible seulement parce que l’homme ne reconnaissait plus aucune norme et aucun juge au-dessus de lui, mais il se prenait lui-même seulement comme norme. Les horreurs des camps de concentration montrent en toute clarté les conséquences de l’absence de Dieu.

Toutefois, je ne voudrais pas m’attarder ici sur l’athéisme prescrit par l’État ; je voudrais plutôt parler de la « décadence » de l’homme dont la conséquence est la réalisation, d’une manière silencieuse et donc plus dangereuse, d’un changement du climat spirituel. L’adoration de l’argent, de l’avoir et du pouvoir, se révèle être une contre-religion, dans laquelle l’homme ne compte plus, mais seulement l’intérêt personnel. Le désir de bonheur dégénère, par exemple, dans une avidité effrénée et inhumaine qui se manifeste dans la domination de la drogue sous ses diverses formes. Il y a les grands, qui avec elle font leurs affaires, et ensuite tous ceux qui sont séduits et abîmés par elle aussi bien dans leur corps que dans leur esprit. La violence devient une chose normale et menace de détruire dans certaines parties du monde notre jeunesse. Puisque la violence devient une chose normale, la paix est détruite et dans ce manque de paix l’homme se détruit lui-même.

L’absence de Dieu conduit à la déchéance de l’homme et de l’humanisme. Mais où est Dieu ? Le connaissons-nous et pouvons-nous Le montrer de nouveau à l’humanité pour fonder une vraie paix ? Résumons d’abord brièvement nos réflexions faites jusqu’ici. J’ai dit qu’il existe une conception et un usage de la religion par lesquels elle devient source de violence, alors que l’orientation de l’homme vers Dieu, vécue avec droiture, est une force de paix. Dans ce contexte, j’ai renvoyé à la nécessité du dialogue, et j’ai parlé de la purification, toujours nécessaire, de la religion vécue. D’autre part, j’ai affirmé que la négation de Dieu corrompt l’homme, le prive de mesures et le conduit à la violence.

En marche vers la vérité

À côté des deux réalités de religion et d’anti-religion, il existe aussi, dans le monde en expansion de l’agnosticisme, une autre orientation de fond: des personnes auxquelles n’a pas été offert le don de pouvoir croire et qui, toutefois, cherchent la vérité, sont à la recherche de Dieu. Des personnes de ce genre n’affirment pas simplement : « Il n’existe aucun Dieu ». Elles souffrent à cause de son absence et, cherchant ce qui est vrai et bon, elles sont intérieurement en marche vers Lui. Elles sont « des pèlerins de la vérité, des pèlerins de la paix ». Elles posent des questions aussi bien à l’une qu’à l’autre partie. Elles ôtent aux athées militants leur fausse certitude, par laquelle ils prétendent savoir qu’il n’existe pas de Dieu, et elles les invitent à devenir, plutôt que polémiques, des personnes en recherche, qui ne perdent pas l’espérance que la vérité existe et que nous pouvons et devons vivre en fonction d’elle. Mais elles mettent aussi en cause les adeptes des religions, pour qu’ils ne considèrent pas Dieu comme une propriété qui leur appartient, si bien qu’ils se sentent autorisés à la violence envers les autres. Ces personnes cherchent la vérité, elles cherchent le vrai Dieu, dont l’image dans les religions, à cause de la façon dont elles sont souvent pratiquées, est fréquemment cachée. Qu’elles ne réussissent pas à trouver Dieu dépend aussi des croyants avec leur image réduite ou même déformée de Dieu. Ainsi, leur lutte intérieure et leur interrogation sont aussi un appel pour les croyants à purifier leur propre foi, afin que Dieu – le vrai Dieu – devienne accessible. C’est pourquoi, j’ai invité spécialement des représentants de ce troisième groupe à notre rencontre à Assise, qui ne réunit pas seulement des représentants d’institutions religieuses. Il s’agit plutôt de se retrouver ensemble dans cet être en marche vers la vérité, de s’engager résolument pour la dignité de l’homme et de servir ensemble la cause de la paix contre toute sorte de violence destructrice du droit.

En conclusion, je voudrais vous assurer que l’Église catholique ne renoncera pas à la lutte contre la violence, à son engagement pour la paix dans le monde. Nous sommes animés par le désir commun d’être « des pèlerins de la vérité, des pèlerins de la paix ».

 

[1] Traduit de l’original anglais transmis par le Rabbin Rosen. Les sous-titres des trois textes ont été ajoutés par la rédaction de Relations judéo-chrétiennes.

[2] Source du texte original anglais: http://www.oikoumene.org/en/resources/documents/general-secretary/speeches/interfaith-peace-meeting-in-assisi.html

[3] Source: http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2011/october/documents/hf_ben-xvi_spe_20111027_assisi_fr.html